L’apocalypse, c’était hier

L’apocalypse, c’était hier

Cabinet malin
Édition
2024/08
DOI:
https://doi.org/10.4414/bms.2024.1373378706
Bull Med Suisses. 2024;105(08):72-73

Publié le 21.02.2024

Numérisation
Des films comme Matrix ont illustré l’asservissement de l’humanité par des machines capables de penser par elles-mêmes. Les scénarios apocalyptiques des théoriciens du complot et autres ennemis du progrès, experts autoproclamés, ont ancré cette image dans la société. Autrefois considérées avec un grand scepticisme, les machines sont aujourd'hui perçues comme la solution miracle par excellence. Notre auteur porte un regard critique sur cette évolution.
Le vent a tourné. De nos jours, toute nouvelle solution doit porter la mention: «soutenue par l’IA», comme la mention de nanotechnologie sur l’étiquette aide à vendre n’importe quel aspirateur. Les informaticiens se réjouissent de conquérir, avec des algorithmes simples, de nouveaux groupes cibles, qui sont autant de nouvelles sources de revenu. L’intelligence artificielle suit le même schéma que toute autre nouvelle technologie. Après l’engouement initial suivi de la déception que provoquent les attentes trop élevées, on identifie peu à peu les applications pertinentes. Et l’IA s’est déjà imposée dans nombre de domaines de notre vie. Spotify ou d’autres programmes proposent par exemple la chanson suivante grâce à des algorithmes apprenants. On accepte le fait que l’algorithme fasse parfois une erreur.

En médecine, les conséquences seraient dramatiques si un algorithme proposait un mauvais traitement.

Mais en médecine, si un mauvais traitement médical était proposé, les conséquences seraient dramatiques. C’est pourquoi les applications d’intelligence artificielle en matière médicale doivent faire l’objet de tests stricts, selon des règles existantes (et nouvelles). Malgré les alertes de certains critiques sur la grande difficulté que constituent ces tests, ils s’avèrent pourtant déjà tout à fait réalisables avec les règles existantes.

Des études cliniques en bonne et due forme

Les nouveaux produits doivent toujours être comparés aux produits existants, indépendamment du pays et du système d’autorisation. Comme l’intelligence artificielle remplace souvent l’avis des expertes et experts, la référence à utiliser est évidente. Il convient en outre de définir le champ d’application et les limites. Il faut ensuite des études cliniques en bonne et due forme, qui valident chaque application. Reste enfin à apporter la preuve de l’apport que représente le recours à l’intelligence artificielle. Cela peut être un meilleur traitement, des économies pour l’hôpital ou un gain de temps auprès des patientes et patients pour le corps médical – l’essentiel est qu’il ne s’agisse pas juste d’une finalité en soi ou d’une étiquette pour vendre.

Il est temps que les affirmations des experts autoproclamés laissent place aux faits scientifiquement avérés.

Il est donc temps que les multiples affirmations des experts autoproclamés laissent place aux faits scientifiquement avérés. Les traitements médicaux pourront alors bénéficier de l’apport de l’intelligence artificielle.
Prof. Dr méd. Jörg Goldhahn Directeur des études de médecine humaine à l’ETH Zurich. Il est l’auteur de cettechronique avec sa collaboratrice Anja Finkel.

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